Existe-t-il un islam « modéré » et qui peut parler au nom des musulmans ?
C’est la question qu’on se pose à la lecture du long article que consacre la Nouvelle République du 28 juillet à Houari Benyagoub au sujet de la lettre qu’il a fait remettre au Diocèse de Blois.
D’emblée il annonce, et c’est le gros titre de cet article, « comme tout le monde nous avons 15 % de salauds !«
Mais de qui parle-t-il et au nom de qui ?
Il s’exprime en tant que président de l’association El Djezair des Algériens du Loir et Cher, dont l’objet est : « lutter pour l’intégration et le respect des institutions républicaines, par l’information via notamment l’acquisition de la nationalité française; prôner la tolérance et le dialogue entre la communauté algérienne et les Loir-et-Chériens; dynamiser les actions de solidarité, et l’entraide sans oublier les actions à caractère humanitaire et culturel; lutter contre les discriminations, le racisme, la xénophobie; lutter contre l’an alphabétisation; prise de mesures de soutien à la recherche et à la réflexion pour l’emploi. » (J.O. du 07/07/2007).
Quel rapport avec le dialogue inter-religieux ?
A moins de considérer que tous les Algériens sont obligatoirement musulmans ?
De plus il n’est pas le seul représentant des Algériens de Loir et Cher, puisqu’il existe également une Association Franco-algérienne de Blois, présidée par Farouk Khettat.
Ce qui est clair, c’est que les déclarations de Houari Benyagoub n’engagent que lui-même et son association, et qu’il n’a aucun titre pour parler au nom de la communauté musulmane, si tant est qu’elle existe tellement elle est divisée comme le montre la « guerre des mosquées » et les épisodes rocambolesques où l’ancien imam de la mosquée Bilal s’était retourné vers les Prud’hommes pour contester son éviction. Et c’est finalement le Maroc qui a pris le contrôle de la mosquée grâce au chèque du Roi.
Mais revenons au fond de l’article.
15% de salauds !
Imaginez que nous écrivions sur ce blog ou dans un quelconque document que la communauté musulmane comporte 15% de salauds ?
Nous serions immédiatement poursuivis et condamnés d’avance par l’ensemble des médias en ébullition.
Il faudra que M. Benyagoub s’explique sur ce chiffre. Veut-il parler de la délinquance ? On sait bien que les musulmans sont sur-représentés dans la population carcérale, en dépit de l’absence de chiffres officiels, mais il suffit de visiter la prison de Blois…
Cela dit, salaud ou délinquant ne veut pas dire terroriste. Heureusement car cela voudrait dire qu’il y a en France des centaines de milliers de terroristes en puissance, ce que personne ne saurait affirmer.
Par contre le fait que ces délinquants constituent un vivier de recrutement est incontestable, d’autant plus que la radicalisation en prison est là encore un phénomène bien connu.
Le mythe de la misère sociale.
Puis vient l’explication facile, celle que l’on nous ressort à chaque occasion : celle de la misère sociale, de l’exclusion, de la défiance etc…
Nous avons déjà répondu en détail à ce discours stéréotypé et démontré sa vacuité.
Non, les quartiers de la ZUP de Blois n’ont pas été des quartiers défavorisés, il n’ont pas été conçus comme des ghettos, ils disposaient de tous les services, davantage peut-être que certains autres quartiers.
Le problème de la ZUP, ce n’est rien d’autre que les conséquences d’une immigration massive de populations dont l’origine, la religion, la culture, rendaient l’intégration problématique pour ne pas parler d’assimilation.
Bien au contraire, alors que les premières générations d’immigrés des années 70 se sont assez bien intégrés et ont le plus souvent respecté leur pays d’accueil, ce sont leurs enfants des 2ème et 3ème générations qui de plus en plus refusent de s’intégrer, et vont jusqu’à rejeter la France.
Ce n’est peut-être pas la majorité, mais une tendance lourde. A tel point que des jeunes collégiennes d’un établissement privé blésois, à qui un professeur demandait leur nationalité, ont répondu : « je suis tunisienne » ou bien « je suis marocaine » alors qu’elles étaient nées en France.
Or nous voyons très bien l’appel du pied de Houari Benyagoub : il faut aider davantage le tissu associatif des « quartiers ». Le problème est que ces associations sont déjà très largement communautaires, et que cela ne réglera rien.
Islam et tolérance.
Enfin, bien qu’il ne soit pas un représentant religieux accrédité, Houari Benyagoub présente un verset du Coran prônant la tolérance et la fraternité entre les hommes.
Bien sûr de tels versets existent, mais il faut tout de même signaler la distinction fondamentale dans le Coran entre le Dar al Islam, « domaine de la soumission à Dieu », autrement dit les pays musulmans dont les croyants forment l’Oumma et le Dar al Harb, « domaine de la guerre », autrement dit les territoires qui ne sont pas encore soumis.
La tolérance évoquée par le verset en question ne s’applique bien sûr qu’au sein du Dar al Islam et encore elle ne semble pas toujours s’y manifester.
Mais les infidèles (Kufr ou Koufar) ne sauraient bénéficier de cette tolérance, seul le rapport des forces en présence faisant que la guerre (forme accomplie du Djihad) soit déclarée ou non.
Il est vrai que l’Islam, comme d’autres religions peut évoluer ou s’adapter en fonction des pays et des circonstances. Mais il faut pour cela combattre l’islam salafiste ou wahabite soutenu par les pétro-monarchies, et dont l’appui est Daech n’est un secret pour personne, ce qui ne nous empêche pas de leur vendre des armes !
Il faudrait aussi que l’Islam fasse son « aggionarmento » en supprimant un certain nombre de versets, au minimum en les accompagnant d’une mise en garde indiquant qu’ils ne font que traduire les moeurs des contemporains du Prophète et appartiennent à l’histoire des religions, mais ne sauraient être enseignés aujourd’hui comme des préceptes.
Nous attendons avec impatience le point de vue des islamistes « modérés » sur cette question pourtant fondamentale.