La France a de quoi se réjouir. L’écrivain d’origine russe Andreï Makine, déjà lauréat du prix Goncourt et du Médicis, a été élu jeudi à l’Académie française au premier tour par 15 voix sur 26 votants.
Cette élection est la preuve, maintes fois répétée par le Front National, que l’amour de la France est bien le premier critère de la francité et de l’assimilation. Laquelle passe par la passion de la langue française et l’acceptation de la totalité de l’héritage français. Et le refus de sa dénaturation par des anglicismes ou orientalismes systématiques !
Et pourtant, Dieu sait si Makine a eu du mal à se faire connaître et reconnaître. Sans doute parce que ce n’est pas un communiquant à la BHL, mais il y a d’autres raisons. Alors que la nationalité est octroyée au distributeur automatique, quand il l’a sollicitée en 1991, elle lui a été refusée. Tout comme ont été refusés par les éditeurs ses premiers romans dont il avait été obligé de dire que c’étaient des traductions de romans russes. Il faut ajouter qu’il n’est pas du genre courtisan germanopratin style têtu et qu’il habite, volontairement, une ferme isolée au fond de la Vendée. Se faire oublier pour garder la mémoire intacte! Toutefois, en 1995, il a été couronné par les prix Goncourt, Goncourt des lycéens et Médicis pour son roman « Le testament français ». Un titre qui résume l’essentiel : nous sommes les héritiers-débiteurs de ceux qui nous ont précédés !
Voilà donc un écrivain qui , arrivé en France de sa Sibérie natale en 1987 à 26 ans, héritier de la langue française par sa grand-mère, nous donne des leçons de beau langage et de belles histoires, toujours denses et parfois difficiles à démêler comme tous les auteurs d’origine russe. On pense à Vladimir Volkoff ou Henri Troyat. Il défend en effet une conception rigoureuse de la langue qui ne supporte ni le « verlan » ni la grammaire approximative, ni les plateaux de télévision où il est impossible de finir sa phrase.
La Bibliothèque de Blois propose la presque totalité de ses 16 ouvrages. Allez en réserver un au hasard. Vous comprendrez le poids des mots et le rôle fondateur de ceux qui, comme les grands-mères, les transmettent avec leur cœur à leurs petits-enfants. Pour « faire lien et société», comme disent les cuistres !
Allez aussi rencontrer Fabrice Luchini qui vient à Blois,demain à la Librairie Labbé. Cet acteur -écrivain démontre par sa vie que naître à la Goutte d’or, fils d’immigré italien, n’est pas une fatalité, pas plus que débuter comme apprenti-coiffeur. A condition d’aimer notre langue et tous ses auteurs, fussent-ils censurés ou à l’Index comme Philippe Murray ou Louis Ferdinand Céline. La Nouvelle République a annoncé sa venue, demain, 5 mars, de 16 à 17h.